Ça commence comme ça : "
-Tu viens dimanche à manger?
-Peux pas… J'ai du boulot
-Même le dimanche…? Porca miseria !
J'aime
pas quand il s'énerve le patriarche. Mais j'aime encore moins venir le
dimanche. C'est le jour où la banlieue fait semblant de revivre, à la
sortie de l'église et au P.M.U. Les deux étapes que j'essaie d'éviter,
quitte à faire un détour, pour ne pas avoir à tendre une main gênée à
des gens qui m'ont connu tout petit, et qui se demandent comment je m'en
sors dans la vie, désormais. Les ritals sont curieux du devenir des
autres."
Je me souviens avoir dévoré Saga il y a déjà un petit moment. Je me suis laissée tenter par cette Commedia des ratés quand je l'ai vu dans le rayon bien fourni de Book Off,
rue du Faubourg-St-Antoine (les bouquins sont à 3,5€, et 9€ les trois,
autant dire que je ne ressors jamais les mains vides de ce lieu de
perdition).
Antoine a grandi à Vitry-sur-Seine (et moi à
Ivry-sur-Seine, la ville mitoyenne) et a quitté sa rue d'immigrés
italiens pour paris. Un jour qu'il rend visite à ses parents, il croise
Dario, un copain d'enfance, qui lui demande d'écrire une lettre pour
lui. Antoine s'exécute à contre cœur. Il veut fuir au plus vite son
vieux pote, son quartier, son passé… Quelques jours plus tard, Dario est
assassiné. Antoine apprend que Dario avait acheté peu de temps avant des
terres en Italie et que lui, Antoine, en est l'héritier. Lorsqu'on essaie aussi de
le tuer, il monte dans le premier train pour son pays d'origine…
L'intrigue
ne m'a pas passionnée, mais j'adore l'écriture de Benacquista et la manière dont il décrit l'Italie : son arrivée à Rome, puis
l'ambiance du village de Sora. J'aime le héros/narrateur, son regard sur Bianca, son obstination. Et par dessus-tout, j'ai trouvé
géniales les descriptions de la préparation des pâtes par les Italiens!
Par exemple :
"-Vous ne les goûtez pas avant de servir?
-Moi,
jamais, mais chacun sa méthode. Je le regarde et ça suffit. Mais je
peux vous prouver qu'elles sont à point, mieux encore que si vous
goûtiez.
Il saisit un spaghetti et ke jette contre le mur.
-Tenez,
regardez. S'il était cru il ne s'accrocherait pas, et s'il était trop
cuit, il glisserait. Ici on peut avoir une cuisson parfaite parce qu'on
est au niveau de la mer.
-Comment ça?
-Vous ne
savez pas qu'on ne fait pas les mêmes pâtes à la mer et à la montagne?
En altitude, l'eau est trop faible, alors il est impossible de faire
cuire une pâte fine parce qu'on doit la saisir très vite dans une
ébullition maximale, sinon ça devient de la colle. Ça explique bien des
choses sur les spécialités régionales. Ah…ici, vous êtes bien tombé ! Je
sais tout, tout, tout ! "
Mais ma préférée, c'est la recette de Bianca. Mieux qu'un bouquin de cuisine. Et j'aime tout se qui passe entre les deux personnages pendant cette scène.
La commedia des ratés, Tonino Benacquista (1991), Folio Policier.
Grand Prix de la littérature policière (1991) Trophée 813 du meilleur roman, Prix Mystère de la critique.
j'ai découvert benacquista avec saga que j'avais adoré. Puis j'ai lu quelques polars et j'ai décroché. Mais je me souviens très très bien de ce passage et j'y repense souvent quand je cuisine des pates !
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